Frithjof Schuon, Témoin de la transparence métaphysique du monde

"Celui qui porte la semence pour la mettre en terre ira en pleurant, mais il reviendra avec un cri de joie quand il rapportera ses gerbes". La Sainte Bible. (1)

(1) Psaumes, Chant du retour, CXXVI, 5-6.

Olivier DARD

à Jean-Paul LIPPI

« Celui qui porte la semence pour la mettre en terre ira en pleurant, mais il reviendra avec un cri de joie quand il rapportera ses gerbes ». La Sainte Bible. (1)

« Nomadiser dans l’étendue infinie du Verbe ». Edmond Jabès. (2)

« Le paradoxe de l’ésotérisme, c’est que d’une part « personne n’allume une lampe pour la mettre sous le boisseau », et que d’autre part « ne donnez pas aux chiens ce qui est sacré » ; entre les deux images se situe la « lumière qui brille dans les ténèbres, mais que les ténèbres n’ont pas comprise ». Il y a là des fluctuations que nul ne peut empêcher et qui sont la rançon de la contingence ». Frithjof Schuon. (3)

« Anfang und Ende reichen sich die Hände » (L’origine et la fin se donnent la main). Proverbe allemand. (4) 

Le 5 mai 1998, dans sa 91 année, le Métaphysicien suisse Frithjof Schuon s’est éteint à Bloomington aux Etats-Unis, entouré des siens, dans la sérénité.

Trop jeune pour avoir eu l’inestimable privilège de suivre directement l’Enseignement de celui qui, selon les termes de Jean-Paul Lippi (5). fût peut-être « le plus grand Témoin de la Tradition (6)  en cette fin du XXe siècle, l’auteur de ces lignes, chrétien orthodoxe, mais très sensible aux splendeurs de « l’âme arabe » – que Schuon lui a révélée – souhaiterait simplement partager ce que fut pour lui la rencontre de cette  oeuvre, et plus précisément la qualité intérieure d’une parole réellement providentielle pour l’homme du prochain millénaire.

(1) Psaumes, Chant du retour, CXXVI, 5-6.

(2) Le Livre des ressemblances, p. 24, Gallimard, Paris, [1976], rééd., 1991.

(3) L’Esotérisme comme Principe et comme Voie, p. 19, Dervy, Paris, 1978.

(4) Cité par Frithjof Schuon, La Transfiguration de  l’homme, p. 75, L’Age d’Homme, Paris, 1995.

(5), Jean-Paul Lippi, auteur de plusieurs études d’esprit Traditionnel, a  publié une remarquable thèse de doctorat : Julius Evola, Métaphysicien et penseur politique : essai d’analyse structurale, L’Age d’Homme, Paris, 1998.

(6), Communication personnelle de M. Jean-Paul Lippi.

Liminaire

L'oeuvre de Schuon poursuit, nous semble-t-il, tout en l'approfondissant considérablement, celle de René Guénon (7)

 (7), Amplitude et distinction qui prend son sens par exemple à travers cette intéressante remarque de Schuon relative à Louis Massignon : "(...) Il n'y a pas de doute que Massignon fut un orientaliste ; le moins qu'on puisse dire est qu'il n'était ni ignorant ni hypocrite. Il était catholique, ce qui était son droit, mais on ne peut lui reprocher de l'étroitesse d'esprit ; il n'aimait pas Ibn 'Arabî, mais il y a à cela des circonstances atténuantes, d'autant qu'il y a des Musulmans qui partagent cette opinion, et d'autant qu'il portait tout son amour sur El-Hallâj. J'ai regretté parfois d'avoir cessé mes relations avec lui sous la pression de Guénon, qui avait à son égard de singuliers préjugés.

J'ajouterai qu'il y a avait chez Massignon une envergure humaine, faite d'intelligence et de noblesse, qui le plaçait bien au-dessus de certains "métaphysiens" guénoniens, dont l'arrogance aveugle donne la mesure de leur petitesse". Cet extrait, au-delà de toute question de divergence doctrinale, permet d'appréhender deux tempéraments face à la perspective  Métaphysique. L'accent mis sur la Réalisation [spirituelle] ou la Déification en ""milieu" chrétien, ainsi que sur la dimension humaine aussi bien sous l'angle éthique (le Bien) qu'"esthétique" (la Beauté, les Arts), constitue une démarcation capitale entre Schuon et Guénon. Pour notre part nous y voyons un enrichissement mutuel et non un antagonisme comme l'a d'ailleurs très bien formulé Léo Schaya dans sa préface à Naissance à l'Esprit.  Ce passage est extrait d'une version inédite de l'étude publiée sous le titre "Quelques critiques", in, Dossier H : René Guénon, L'Age d'Homme, Paris, 1984.

L’oeuvre de Schuon poursuit, nous semble-t-il, tout en l’approfondissant considérablement, celle de René Guénon (7)  – qu’il coudoya durant un quart de siècle – et occupe une « fonction » parallèle et distincte de la sienne, qui peut s’interpréter ainsi que l’ont relevé plusieurs commentateurs, comme une « Remanifestation » éliatique, entre autre par le fait exceptionnel et presque unique pour le XXe siècle, du rayonnement qu’atteste son universalité.

Cette référence au prophète Seyidna Dhûl-Kifl s’appuie sur le sens de Sa mission, ainsi explicitée par Léo Schaya :  » « Elie » ne signifie pas seulement l’ésotérisme et son influence sur l’exotérisme juif, mais encore l’ésotérisme dans son universalité, qui relie les Mystères de la Torah à ceux de toutes les traditions authentiques d’Orient et d’Occident. (8) (…) Chaque fois que la tradition a besoin d’être revivifiée de l’intérieur, précise Schaya, Elie (…) le Maître invisible (…) descend secrètement en ce bas monde. (…) Son influence se généralisera, se fera (…) à travers toutes les religions intrinsèquement orthodoxes. Elie « proclamera la paix » entre elles, c’est-à-dire qu’il révélera leur unité essentielle et transcendante qui, à l’avènement final du Messie, et à ce moment seulement, se manifestera sous une nouvelle forme unanime d’affirmation de l’Un. (9)  Les traces du message schuonien n’ont-elles pas cette vertu ? A l’aube du prochain millénaire n’y a-t-il pas légitimité de s’enquérir à ce propos ?

Si l’on considère l’oeuvre de Frithjof Schuon son évocation est alors une mission risquée  et délicate, car nous ne sommes aucunement en présence, par l’attention de l’ineffable qui s’y manifeste en de nombreux livres, d’une « pensée mentale » et/ou profane, amis d’une parole où le contenant et le contenu confluent fondamentalement vers cet invisible qui nous relie : le Sacré.

Ici est radicalement distinguée la « philosophie », dans l’acception commune et « moderne », qui part toujours d’un doute, de la « métaphysique » « édifiée » sur une certitude. Schuon en souligne immédiatement la portée dans la préface De l’Unité transcendante des religions. (10), afin d’éviter les malentendus. L’un de ceux-ci, réitéré sous de nombreuses formulations, – et repris par des groupes « New Age » – consiste à opposer les religions dite « polythéistes » faussement qualifiées de « païennes », à celles dite « monothéistes », sans comprendre que d’un certain point de vue, proprement métaphysique ou encore « ésotérique », ces antagonismes « avant tout » formels s’évanouissent. (11)

1. Une oeuvre où est célébrée la semence de l’Invisible : (12)

 

L’oeuvre de Schuon est la rencontre de l’homme avec la nature oubliée de son être : La Tradition. Qu’est-ce qui dans ce mot peut me parler à moi occidental immergé dans le devenir et le mouvement incessant qu’il produit ? Dans une formule volontairement compendieuse, nous répondrons : La Tradition c’est l’Amour. D’abord l’amour de cette lumière, nécessairement incréée, qui est accueil de la présence au sein des formes que le monde recèle. Si la lumière est incréée, c’est que nous n’en percevons que le prisme – le chatoiement de ses teintes comme  l’alternance de sa froidure ou de sa brûlure – suivant son mode de rayonnement reflété à travers la multiplicité des choses ou du réel. Ainsi, sa source diaphane et invisible demeure enfouie dans l’humus de l’être. L’unité qui est son origine et son lieu de naissance requiert une attention bienveillante, une vigilance de notre part pour en capter l’essence. L’accord, tel un diapason, ne s’engendre  et n’intervient que lorsqu’il y a harmonie entre notre expérience partielle du créé et notre perception intuitive de la nature intégrale et intégrante de l’incréé. Cette affinité, ce diapason, c’est le ton, qui rythme la parole schuonienne : selon la proposition du Critias de Platon, « pour parler de l’ineffable il faut avoir un certain ton ». (13) Ce dernier est prégnant, et peut-être n’y a-t-on assez insisté, sous deux modalités entre lesquelles se tient l’équilibre du sens : un souci « pluri-signifiant » de l’usage de l’ellipse, lié au symbole et au divin et une aséité, (14)  un dépouillement de l’expression par l’humain, dans la plus pure simplicité monacale. Le symbole est alors un moyen de cet accord, sa respiration dans la paix qu’il instaure chez le lecteur, ou encore comme le Verbe unanime du Ciel et de  la terre. Nous plongeons dans la venaison du monde mais celle-ci n’étanche point notre soif de l’unité consubstantielle qui lui est prévalent. C’est en ajustant les deux images perçues, celle rugueuse de notre vieux compagnon ici et celle  à la fois cosmique et universelle de son mode d’être identifié en chacun de ses frères que la contingence et la relativité pourront se résorber dans la conformité à son prototype divin. Or cette unité ne peut se découvrir, se contempler, qu’au-delà des voiles qui dans la contrée du multiple, en dissimule à l’oeil inexpérimenté la clarté parfois insoutenable. On ne peut   regarder de face le soleil dans tout son éclat.

La citation de Schuon mise en exergue à propos du « paradoxe de l’ésotérisme » traduit cette immuable relation entre le dehors et le dedans, l’externe et l’interne. Il y a une « alchimie » de la « prise » et de la déprise entre ce qui saisit, se dessaisit et voudrait être « saisi ». Cette liaison de l’exotérique à l’ésotérique murmure l’insondable mystère où nous n’épuisons jamais ce qui veut résonner de la Parole de Dieu en nous.

Nous avons dit que La Tradition est Amour. Elle l’est dans la mesure même de notre gratitude envers la Création dont nous sommes le surgeon. Et cet acte de reconnaissance ou de générosité est l’une des expressions de ce qui s’énonce sous le vocable de « Tradition ». Lanza del Vasto relevait à cet égard que « philosophie veut dire amour de la sagesse ou mieux sagesse d’amour ». (15) Celui qui ordonne notre fin, et de ce fait notre Bien est précisément « ce centre immuable qui met tout en mouvement, de la même manière que l’objet aimé met en mouvement celui qui aime ». (16)   La doctrine hindoue des trois gunas déterminera ce Bien, une des vertus, dans l’aspiration qualifiée de « sattvique », qui est conformité à l’équilibre cosmique. (17)  Parce que l’étymologie nous apprend que Kosmos signifie « Ordre », la Tradition – transmission de cette « Sainte Ordonnance » d’après saint Denys l’Aréopagyte – manifeste nécessairement l’amour divin dans le coeur humain ; et elle le manifeste dans l’exacte mesure où l’amour « ne justifie pas une prétendue liberté de « supprimer les frontières, qu’il ne légitime pas le chaos, [parce qu’il] est une partie de l’ordre créé, et  [que] c’est dans la défense de cet ordre, non dans la destruction que l’amour peut se réaliser. (18) Saint Bernard ne disait-il pas : « Il faut en effet qu’une même charité nous unisse tous et scelle notre unité dans le corps du Christ : mais cette charité ne subsiste vraiment que dans l’ordre et la hiérarchie ». (19)  C’est au sein de cette « Somme » de la Philosophia Perennis que Schuon nous offre et qu’Ananda K. Coomaraswamy appelait de ses voeux dans l’avertissement d’Hindouisme et Bouddhisme (20)  que nous découvrons émerveillé quelques unes de ses plus belles sentences. Par cet accès à l’universalité des principales Révélations que la Terre a connue, nous approchons de cette « intelligence qui est le  plus rapide des oiseaux » nous dit le Rig Veda (21). parce qu’elle sort de la bouche de YHVH ainsi que l’énonce pareillement Le livre des Proverbes. Relevons au passage que cette « fulgurance » de l’intelligence est peut-être l’une des grâces prodiguées envers Schuon ! Nous verrons en quoi elle s’avère fondamentale dans la question du rationalisme.

Une autre manière de signifier les concordances de cet Amour, nous est donnée par l’un des trois grands interprètes (22) de l’Islam intérieur, Jalâl ad-Dîn Rûmî qui s’exprimait ainsi : « Je ne suis ni chrétien, ni juif, ni guèbre, ni musulman. Je ne suis ni d’Orient ni d’Occident, ni de la terre ni de la mer… J’ai mis la dualité de côté, j’ai vu que les deux mondes ne font qu’un. Un seul je recherche, Un seul je connais, Un seul je vois, Un seul j’invoque. Il est le Premier, Il est le Dernier, Il est l’Extérieur, Il est l’Intérieur ». (23) Cette citation éclaire particulièrement l’oeuvre de Schuon caractérisée tant dans sa dimension d’universalité déjà entrevue, que dans son orthodoxie rigoureuse et son unité intrinsèque. Une autre image, celle du mandala (24)  qualifie bien non seulement le mode d’énonciation mais ce que nous appellerons la géographie sacrée qui lui est raccordée, et qui instaure ou éveille le divin dans les différents états d’être, comme le font les incidences des rythmes originels portés en soi, le plus souvent dans l’oubli de ce  que l’on est. Ce que l’on « est », c’est-à-dire en tant que « créature déiforme douée d’une intelligence capable de choisir ce qui y mène », (25)  rappelle Schuon. La Tradition est Amour par le maintien de l’éternel Présent au sein des racines de ce qui advient.

Le professeur James S. Cutsinger dans un excellent ouvrage (26) consacré à l’oeuvre de Schuon où l’accent est mis sur la Voie spirituelle et ses fondements doctrinaux, (27) a proposé quatre orientations métaphysiques pour délimiter cette géographie sacrée : la Vérité, la Vertu, la Beauté et la Prière – cette « barque salvatrice » selon une belle métaphore que nous empruntons à Schuon – qui irriguent toutes de leur Eau lustrale le corps de ses livres, chair diaphane du monde, dévouement envers l’Invisible du Livre. Ces quatre « orientations » seront notre trace pour pénétrer plus avant cette oeuvre.

 (7), Amplitude et distinction qui prend son sens par exemple à travers cette intéressante remarque de Schuon relative à Louis Massignon : « (…) Il n’y a pas de doute que Massignon fut un orientaliste ; le moins qu’on puisse dire est qu’il n’était ni ignorant ni hypocrite. Il était catholique, ce qui était son droit, mais on ne peut lui reprocher de l’étroitesse d’esprit ; il n’aimait pas Ibn ‘Arabî, mais il y a à cela des circonstances atténuantes, d’autant qu’il y a des Musulmans qui partagent cette opinion, et d’autant qu’il portait tout son amour sur El-Hallâj. J’ai regretté parfois d’avoir cessé mes relations avec lui sous la pression de Guénon, qui avait à son égard de singuliers préjugés. J’ajouterai qu’il y a avait chez Massignon une envergure humaine, faite d’intelligence et de noblesse, qui le plaçait bien au-dessus de certains « métaphysiens » guénoniens, dont l’arrogance aveugle donne la mesure de leur petitesse ». Cet extrait, au-delà de toute question de divergence doctrinale, permet d’appréhender deux tempéraments face à la perspective  Métaphysique. L’accent mis sur la Réalisation [spirituelle] ou la Déification en «  »milieu » chrétien, ainsi que sur la dimension humaine aussi bien sous l’angle éthique (le Bien) qu' »esthétique » (la Beauté, les Arts), constitue une démarcation capitale entre Schuon et Guénon. Pour notre part nous y voyons un enrichissement mutuel et non un antagonisme comme l’a d’ailleurs très bien formulé Léo Schaya dans sa préface à Naissance à l’Esprit.  Ce passage est extrait d’une version inédite de l’étude publiée sous le titre « Quelques critiques », in, Dossier H : René Guénon, L’Age d’Homme, Paris, 1984.

(8) Léo Schaya, La Création en Dieu, à la lumière du Judaïsme, du Christianisme et de l’Islam, p. 532, Dervy, Paris, 1983. « 

(9) Léo Schaya, op. cit., p. 534.

(10) Op. cit., préface, Le Seuil, Paris, 1979, p. 9.

 (11) Dans Perspectives spirituels et faits humains, Schuon précise au sujet du paganisme : « S’il ne se réduit pas à un culte des esprits, – culte pratiquement  athée qui n’exclut pas la notion théorique d’un Dieu – est proprement un « angélothéisme », le fait que le culte s’adresse à Dieu dans sa « diversité », si l’on peut dire, ne suffit pas pour empêcher la réduction du Divin – dans la pensée des hommes – au niveau des puissances créées. L’unité divine prime le caractère divin de la diversité : il est plus important de croire à Dieu – donc à l’Un – que de croire à la divinité de tel principe universel ». Op. cit., p. 91.

(12) Allusion à l’excellent ouvrage du suédois Tage Lindbom (1909 – 2001), L’Ivraie et le bon grain ou le royaume de l’homme à l’heure des échéances, Archè & Edidit, Milan et Paris, 1976, p. 151.

(13) Op. cit., « ouverture », Critias, Timée, en 106a, trad. nouv., de Luc Brisson , « GF », Flammarion No 618, Paris, 1992, p. 353. L’ancienne traduction de 1962 d’Emile Chambry, même éditeur, quoique moins concise sur un plan stylistique, nous semble à quelques égards, plus précise, particulièrement dans le cas de la citation citée en référence.

(14) André Lalande, dans son Vocabulaire technique et critique de la philosophie définit ainsi ce terme : « Qualité d’un être qui possède en soi-même la raison et la principe de sa propre existence. S’oppose chez les Scolastiques au mot abaliété, qualité d’un être dont l’existence dépend d’un autre », op. cit., 13e Ed., P.U.F., Paris, 1980, p. 82.

 (15) Voir, La Trinité spirituelle, Le Rocher, Paris, 1994, p. 170.

(16) L’Ivraie et le bon grain…, op. cit., p. 151.

(17) Voir, Frithjof Schuon, « Trangression et purification », in, L’Oeil du coeur, pp 128 et suiv. Dervy, Paris, 1974. Schuon y développe  admirablement la relation de l’homme et  des communautés humaines avec la Loi de Dieu dans les diverses Révélations, et ce qu’il en advient lorsque nous la transgressons.

 (18) L’Ivraie et le bon grain…, Op. cit., p. 147.

(19) « Sermons 49 sur le Cantique », in, Textes Politiques, trad., de Paul Zumthor, « 10/18, Bibliothèque médiévale No 1781, U.G.E., Paris, 1986, p. 55.

(20). Op. cit., « Idées » No 22, Gallimard, Paris, 1980, p. 7.

 (21). En VI, 9 – 5, cité par Mircea Eliade, in, « Le symbolisme des ténèbres dans les religions archaïques », in, Polarité du symbole, Etudes Carmélitaines, Desclée de Brouwer, Bruges, 1960, p. 16

 (22) Les deux autres étant Sohrawardî, Shaykh al-Ishrâq, et Muhyi-d-dîn Ibn ‘Arabî, Shaykh al-Akbar. Ceci n’entend aucunement signifier que nous considérons qu’il n’y a pas d’autres représentants qualifiés de l’Islam, amis que nous sommes en présence, à travers eux, de trois « moments » ou trois pôles significatifs de ce qu’il y a de plus pur dans l’Esprit musulman.

 (23) Extrait de son Dîwân, cité par F. Schuon, in, Forme et substance dans les religions, Dervy, Paris, 1975, note 3, p. 21.

(24), J’ai déjà usé de cette image dans mon étude : « Frithjof Schuon le Jnânî, transparence et primordialité chez un métaphysicien et maitre spirituel du XXe siècle », in, Vouloir, No 1 [114 – 118], juin 1994. Cet article a été publié sur Internet sans l’autorisation ou sans avoir sollicité son auteur à ce sujet et sans que celui-ci puisse émettre quelques remarques  que ce soit.

(25) In, Comprendre l’Islam, Points Sagesses No Sa 7, Le Seuil, Paris, 1976, p. 13.

(26)  Malheureusement non encore traduit en langue française : Advice to the Serious Seeker : Meditations on the Teaching of Frithjof Schuon, Suny Press, State University of New York Press, Albany, 1997. Ce livre est subdivisé en quatre « parties » que nous reprenons ici comme point de repère de l’oeuvre de Schuon. L’auteur (1953 – 2020) décédé depuis la parution de la présente étude était professeur de théologie et d’histoire des doctrines religieuses à l’Université de la Caroline du Sud aux USA. Il était également rattaché à l’Eglise Orthodoxe.

 (27) Recension de l’ouvrage précité par le Pr. Patrick Laude, in, Connaissance des religions, Nos 51-52, « Lumières du Moyen-Age », juillet-décembre 1997, pp 235 – 236, qui signale que « ne sont pas directement développés dans [cet] ouvrage : la critique du monde moderne d’une part, et la question de l’Unité transcendante des religions d’autre part ».

2. De la Vérité :

Selon « la maxime des maharadjahs de Bénarès, il n’y a pas de droit supérieur à celui de la Vérité » (28) Bien sûr, il convient de ne pas confiner à la raison ce qui est ici entendu et étendu aux orientations ci-dessus mentionnées. En métaphysique véritable – ou ésotérisme – il n’y a jamais sens unilatéral, aussi bien : « Si d’une part il y a opposition entre le Créateur et la créature, il y a d’autre part unité d’Essence ; c’est ce que ne saurait saisir le point de vue exotérique, incapable qu’il est, d’abord d’admettre des rapports différents, et ensuite de comprendre la simultanéité de rapports antinomiques (29)   Il n’admettra donc qu’un seul rapport, le plus apparent et le plus opportun au point de vue humain ». (30) Ce point de logique « classique » rappelé, arrêtons-nous quelque peu sur les raisons qui rendent impossible ou difficiles la compréhension profonde, ultime de cette notion, que le grand mystique Nicolas de Cues, appelait complexio oppositorum ou « coïncidence des opposés », ainsi que sur les caractéristiques « cognitives » et « rationnelles » qui ont induit d’une certaine façon cette cécité constatée à l’endroit de toute transcendance : l’accueil de Dieu ou de l’Absolu au sein de l’intelligence humaine.

Si, comme le montre remarquablement Jean Borella (31), « on accepte de définir la raison, dans son activité, comme la faculté de lier entre eux des jugements (donc des connaissances) selon des règles ou principes, on voit que cette raison raisonnante se trouve située entre deux sortes de réalité qui la dépassent et dont elle est tributaire : les connaissances qu’elle reçoit « de l’extérieur » (perception, révélation) ou « de l’intérieur » (Intellection, inspiration) d’une part, et d’autre part les principes innés auxquels elle obéit et qui constituent sa structure dynamique. D’un côté elle mendie du savoir, c’est-à-dire du réel connu, de l’autre elle est conscience réfléchie d’une exigence d’ordre, c’est-à-dire d’une relation fondée entre un savoir et un autre, et, finalement, exigence de l’organisation générale de tous les savoirs entre eux. L’exigence d’ordre, les lois dont l’observance par le mental définit la raison même, sont l’objet d’une science qu’on appelle la logique. Or, c’est précisément cette double dépendance qui prive la raison de toute autonomie absolue, et qui rend caduques les prétentions hégémoniques du rationalisme. 

Durant toute l’ère médiévale, jusqu’à l’apparition catastrophique du nominalisme philosophique (32), a prévalu une unité indivisible de la Réalité où une parole réfléchissait toujours la Parole, ou un mot – semblablement les sentences et proverbes – n’était jamais détaché du signe et du sens sacré auquel il renvoie prioritairement. Comme René Guénon l’a rappelé (33), le mot grec muthos, vient de la racine mu, et celle-ci (qui se retrouve dans le latin mutus, muet) représente la bouche fermée, et par suite le silence, (…). Quant à mueô, et c’est là ce qu’il y a de plus important, il signifie initier aux « mystères », (…) et par suite, à la fois instruire ([mais] sans paroles) et consacrer ; nous devrions même dire en premier lieu consacrer, si l’on entend par « consécration », comme ils e doit normalement, la transmission d’une influence spirituelle (…) ». Nous voyons ainsi à travers cet exemple d’étymologie, que l’envers et l’endroit des choses n’établissait leurs sens qu’au moyen d’une unité plus profonde, et que l’instrument privilégié pour l’atteindre, maintenir cette compréhension est l’Intellect ou l’oeil du coeur. C’est pour cela que René Guénon  notait (34) « (…) C’est l’intuition intellectuelle et la doctrine métaphysique pure qui sont au principe de toute civilisation traditionnelle ; dès qu’on nie le principe, on en nie aussi toutes les conséquences, au moins implicitement ».

Or le rationalisme, matrice du relativisme comme du criticisme néo-kantien, est un agent privatif, il prive l’intelligence, de sa primauté sur-ontologique, de son lien direct avec l’Absolu divin. Il appose entre l’homme – l’être – et la nature une opacité qui obstrue tout sens du sacré. Ainsi l’homme moderne se retrouve écartelé entre une double contradiction : d’une part les diverses théories scientifiques (35) qui produisent un épuisement du « je » en tant que sujet connaissant à travers un éparpillement phénoménal dépourvu d’objectivité transcendantale, et d’autre part, le « dépoli » de la démarche psychologique par laquelle ce même « je » ne découvre aucune assise réelle du fait de l’intersubjectivité et de la relativité à laquelle ile st de fait renvoyé.

La Tradition est Amour par la bonne mesure qu’elle désigne et inventorie, au moyen du respect du Saint Nom qui est foi, dans le tissu dense de l’étoffe humaine.

 (28) Frithjof Schuon, Le jeu des masques, cité d’après Note 7/, p. 25, L’Age d’Homme, Paris, 1992. Sur la relation de la Vérité à l’historicité, voir les capitales remarques de Schuon, in, Sentiers de Gnose, pp 22 et suiv., La Place Royale, Paris, 1987.

(29). Cette « notion » est essentielle ! Mais il s’agit de la vivre et non de simplement la concevoir sur le plan mental. C’est-à-dire qu’il convient de procéder face aux événements quotidiens en fonction de ce principe. La psychologie moderne, si elle ne se cantonne pas à la « physique » obsolète du mécanicisme freudien, entre autre dans son approche « systémique », dérivée des travaux de Grégory Bateson, établit des « réseaux de correspondances » qui voisinent avec la « notion » précitée de Schuon, mais en demeurant, néanmoins, prisonnière d’une perception « horizontale », immanentiste, qui ne met pas réellement en « dialectique » les deux « couples notionnels » précités. Voir, Paul Watzlawick et al., Une logique de la communication, Points-essais No 102, Le Seuil, Paris, 1979.

 (30) In, Frithjof Schuon, Christianisme / Islam : Visions d’oeucuménisme ésotérique, Archè & Edidit, Milan et Paris, 1981, p. 173. « Humain trop humain », aurait ajouté le philosophe allemand Nietzsche. En Vérité, humain trop « humanitariste », « sentimental » et par ce processus « déshumanisé » de son Humanité première, ontologique et cosmologique , si l’on nous permet cette formulation elliptique. C’est nous qui soulignons certains passages en les mettant en italiques. 

 (31) Voir, « Frithjof Schuon ou la sainteté de l’intelligence », in, Religion of the Heart, essays presented to Frithjof Schuon on is eightieth birthday, Foundation for Traditional Studies, Washington, 1991, pp 19 – 34, op. cit., pp 22 – 23. Recueil publié pour le quatre-vingtième anniversaire de Schuon. L’importance de cette longue citation tient au fait qu’on ne rencontre pas cette critique de la philosophie chez Guénon, et qu’à cette conception du rationalisme se trouve lié la majorité écrasante de l’épistémologie des sciences actuelles, à travers le criticisme kantien qui, ajoute Jean Borella, « corrompt la raison » par un relativisme disproportionné face à ses objectifs. Et comme cette « corruption » de la raison empoisonne la foi, il nous a paru d’autant plus nécessaire d’y insister. Jean Borella s’est amplement inspiré, pour cet article, des premiers chapitres de Logique et Transcendance [1970] de Frithjof Schuon, qui constitue « l’analyse » et la réfutation la plus pénétrante jamais écrite sur ces questions.

 (32) « Ce libéralisme philosophique, dont la première expression est le nominalisme, inaugure en effet l’ère du doute par la négation de valeurs universelles comme le Vrai, le Beau ou le Juste, toutes relativisées à l’aune de l’individu raisonnant » écrit avec justesse Christophe Boutin dans sa thèse de doctorat : Politique et Tradition : Julius Evola dans le siècle, Kimé, Paris, 1992, p. 149. 

(33) Voir, Aperçus sur l’Initiation, chap. XVII, p. 123, Traditionnelles, Paris, 1992.

 (34) : In, La Crise du monde moderne, « Idées » No 177, Gallimard, Paris, 1969, p. 97.

 (35) Oswald Spengler a bien vu, une partie de ce processus lorsqu’il relève : « Aussi l’histoire de la science occidentale est-elle celle de notre émancipation progressive de la pensée antique (…) », chap. « Du sens des nombres », vol. 1er, in, Le Déclin de l’Occident, Gallimard, Paris, 1978, p. 85.

3. De la Vertu :

Avec le reflux d’une fausse « libération » (36)  que la crise de civilisation a amené, certains s’interrogent à nouveau sur la morale et les vertus mais de façon tronquée, et surtout sans remettre en cause les présupposés de la modernité.

Ainsi que nous avons pu le voir dans le rapport à la rationalité, ce sont ces derniers qui par leur propension à ruiner tout lien, produisent ce «  »péché d’extériorité », lequel engendre (…) fatalement tous les autres (37) en en répercutant plus dans l’ordre de l’éthique humaine les qualités qui sont celles de Dieu : sous la double dimension de la réceptivité « verticale » – qui est sanctifiante et unitive – et du don à l’autre, au prochain, « horizontal »,qui est bonté et générosité.

Or la « vie » d’une vertu en soi ne s’actualise que par le rayonnement divin exercé dans sa substance. C’est à cette jonction que se noue l’énigme de l’objectivité et de la subjectivité. Et « être parfaitement objectif c’est un peu mourir ; l’homme moyen n’est certes pas prêt à y consentir (38) résume Frithjof Schuon.

Les vertus sont ainsi autant de modalités et de couleurs par où Dieu se mire dans le coeur de l’homme. C’est en ecs ens que Schuon peut dire : « (…) C’est toute la différence entre (…) le reflet en tant que tel et le phénomène en tant que principe reflété. S’il est vrai que nous portons en nous-mêmes ce que nous aimons au-dehors, il est vrai également que nous aimons ce que nous devons être, et nous devons l’être parce que, plus profondément et éternellement, nous le sommes. D’une part, Mâyâ est Mâyâ et Atmâ est Atmâ ; d’autre part, Mâyâ « n’est autre » qu’Atmâ, sans quoi elle ne serait pas » (39) En résumé, et comme Schuon le précise : si « l’intelligence c’est discerner la Réalité transcendante (…) l’intériorité c’est s’unir à la Réalité immanente ; l’un ne vas pas sans l’autre. Le discernement, de par sa nature, appelle l’union ; les deux éléments impliquant la vertu, par voie de conséquence et même à priori » (40)

On peut alors dresser des « couples relationnels » entre ces vertus divines et leur actualisation dans le terreau humain : la pureté génère du détachement, comme la bonté produit de la générosité, et la force de la vigilance ou la beauté de la gratitude, nous avons là autant d’expression de la toute possibilité dans sa dimension de  miséricorde. Schuon ajoute : « Il est très significatif que dans les doctrines Traditionnelles qui insistent le plus sur la Miséricorde – l’Amidisme par exemple – le point de départ est la conviction de mériter l’enfer et de n’être sauvé que par la Bonté du Ciel ; la voie consiste alors, non à e sauver par ses propres mérites puisque cela est considéré comme chose impossible, amis à se conformer moralement, intellectuellement et rituellement aux exigences d’une Miséricorde qui désire nous sauver et à laquelle nous n’avons qu’à nous ouvrir ». (41)

L’homme moderne est un peu comme le corbeau de la fable de La Fontaine : il a laissé tomber de son bec, sa part la plus fragile qui est aussi celle de sa plus grande rectitude : la règle qui équilibre le battement de son coeur. Il oublie le moineau du conte de Grimm qui a pris refuge dans « l’église », ce temple intérieur : « S’en remettre pour tout dans les mains du Seigneur, souffrir avec patience, être bon et prier, cultiver sa conscience et bonne foi garder, ainsi l’on est sauvé par Dieu notre Sauveur ». (42) L’homme « moderne » reste sur le parvis de tous les temples (43) Mais sa nature essentielle s’en va aux vents mauvais de l’inadvertance et il anathématise tous les renards, ombres des ses passions. Ainsi s’est-il dépossédé de sa propre contenance, et rompu le fil qui le guidait vers l’airain de sa mémoire. Car cette part fragile, c’est sa chair, sa vie dans l’indicible, l’esprit qui fulgure parfois au-delà des concrétions existentielles en lesquelles ils e confine. 

A l’envers, la Tradition est ainsi Amour, par l’attirance spontanée en toute conscience de la transparence qu’elle sollicite ; elle est paix dans la fidélité aux vertus où se déploie l’Espérance.

 (36) Voir ci-dessus notre commentaire sur la place de l’amour au sein de l’ordre cosmique. Pour comprendre où mènent les impasses de la modernité sur le plan de la sexualité , voir Métaphysique du sexe (rééd.) de Julius Evola, ainsi que le chapitre « le problème de la sexualité », in, L’Esotérisme comme  Principe et comme Voie, op. cit., pp 125 -141. Comme exemple de recherche d’une certaine « morale » ou « bien-être » : On se donne bonne conscience en prétendant s’intéresser au yoga ou au bouddhisme, mais on refuse les implications religieuses et métaphysiques  qui s’ensuivent, et on (sic) agrémente ce dernier à toutes les sauces les plus anti-Traditionnelles qui soient ! Sans doute la plénitude se trouve-t-elle dans la « politique de l’autruche » et le gonflement de l’ego ?

 (37) in, L’Esotérisme comme Principe et comme Voie, op.cit., p. 154.

 (38) in, Racines de la condition humaine, La Table Ronde, Paris, 1990, p. 154.

 (39)  Op. cit., p. 158.

 (40). Op. cit., p. 138.

 (41) In, Forme et Substance dans les religions, Dervy, Paris, 1975, p. 110. L’Amidisme est une des importantes Voies du Bouddhisme, il est fondé sur le culte du Bouddha Amitâbha, grande Manifestation de la Miséricodre salvatrice. Ses deux représentants les plus remarquables sont Nâgârjuna et Hônen Shônin. Voir sur ce point le chapitre « David, Shankara, Hônen », in, Avoir un centre, Maisonneuve & Larose, Paris, 1988, pp. 119 -130.

 (42) In, Jacob et Wilhelm Grimm, « Le moineau et ses quatre petits », in, Contes, tome II, p. 321, Flammarion, Paris, 1986.

(43) Dans un raccourci saisissant, Raymond Abellio ne disait-il pas quelque part : « Le monde moderne, c’est l’homme dans le temple, la Tradition c’est le Temple dans l’homme »…

4. De la Beauté :

« le monde moderne, engagé sans espoir sur la pente d’une laideur sans remède, a furieusement aboli et la notion de beauté et critériologie des formes ». (44) Ces lignes de Schuon indiquent comment la beauté s’est égarée, semblablement aux vertus, dans la déréliction – la Chute – de la relation normative que l’homme entretenait avec la nature vierge.

Mais pour appréhender ce trait de la primordialité, peut-être est-il nécessaire de poser quelques jalons en soulignant certains des travers rédhibitoires et récurrents de la « modernité » qui nous a retiré de la « notion » même de beauté : pour concevoir la beauté, « dimension » et non « concept », il y a lieu en premier de s’extraire du point de vue considéré comme (sic) « naturel », qui rapporte toute valeur à celle de la société « moderne », actuelle. En d’autres termes il s’agit de se dégager de ce « colonialisme mental » ou de cet « égocentrisme évolutionniste » et « progressiste » qui ramène toujours à lui-même le regard qu’il condescend à porter sur les civilisations qui nous ont précédées. Il est possible de dire que le Darwinisme, « cheval de Troie au service du « titanisme » moderne a décomposé, annihilé une certaine représentation de l’unité humaine, en niant la spécificité de l’homme et en le réduisant au rôle d’animal « évolué ».  Mais il a aussi égaré l’homme dans le reflux fangeux de ses interrogations. Daniel Cologne relève dans ce sens : « En attribuant à tous les hommes la même origine animale, le Darwinisme élabore, dans le droit fil de l’absurdité égalitaire, un précieux instrument de mobilisation de l’humain au service de la civilisation moderne ». (45) A contrario, il est remarquable qu’une oeuvre telle que Logique et Transcendance, par les preuves – proportionnées au type d’intelligence qui les reçoit – lumineuses qu’elle présente sur les racines de l’intelligence, ait démontré la nature prééminente, miraculeuse, du lien unissant la créature à Son Créateur. Bref, l’urgence d’une quête intérieure, d’un ésotérisme bien compris ne s’est jamais autant fait sentir, particulièrement lorsqu’il s’agit d’appréhender la beauté. Alors que la société « moderne » n’en retient qu’un tégument sec qui justifie son impuissance à vivre et à épanouir l’altérité propre de l’état humain. Altérité que symbolise d’une certaine façon le dieu Hermès, signe et lien tout à la fois, puisqu’il est le pont entre le langage et sa vivification spirituelle. En offrant à Apollon sa première lyre n’a-t-il pas inscrit la lettre de la beauté dans l’Esprit apte à la contempler ? La relation qu’induit le message laisse vivante la « différence ». Circonscrite à l’Art sacré – mais sans lui être réductible – , cette dernière se situe dans le frémissement, l’écart apporté par l’artisan dans son travail lorsqu’il s’essaie à modeler la chose d’après son être symbolisé.

La beauté est l’hospitalité, selon des formes appropriées à en traduire l’âme, du fleuve de l’esprit qui pénètre chaque tradition. L’artisan opère sur la « materia prima » du beau afin d’en libérer, d’en déployer la configuration qui y est enfouie. Ceci explique pourquoi, du point de vue Traditionnel, l’Art sacré est une translation du foisonnement de la Natura naturans et non pas une banale copie des excentricités d’une natura naturata. Titus Burckhardt écrit : « Selon la vision spirituelle du monde, la beauté d’une chose n’est rien d’autre que la transparence de ses enveloppes existentielles ; le véritable art est beau parce qu’il est vrai ». (46) La vérité qu’il transmet permet la contemplation sensible de sa provenance archétypale suprasensible.

La beauté ne saurait donc être détachée de la stabilité du Réel duquel elle relève, à la fois comme une enveloppe transparente et rayonnante, et en tant qu’annonce et alliance du mystère de notre « condition » éminemment surnaturelle. Toute l’oeuvre de Schuon en est un éclatant témoignage à travers le tissage de la Manifestation divine qu’elle déploie sur l’arc-en-ciel du monde et le prisme du coeur humain. Cette qualité est amitié intrinsèque au sens de la philia grecque, gratitude envers la Manifestation et son Nom qui « jette sur les choses de ce monde ou de notre âme comme une immense nappe de neige qui éteint tout, et qui unit tout dans une même pureté, et dans un même silence débordant et éternel ». (47) Cette gratitude qui perçoit toujours la danse du Divin derrière le paravent du langage, est la lampe du Seigneur « grâce à laquelle l’homme apprécie comme un enfant la valeur des petites choses ; l’homme noble, qui a le sens du sacré, se situe à l’antipode de l’homme blasé et trivial, qui ne respecte rien. Quiconque, ajoute Schuon, n’apprécie pas les dons de Dieu dans le monde, est incapable de les apprécier dans le coeur, il n’y a pas de contemplativité sans reconnaissance, donc sans humilité ». (48)

Chez le peintre d’icônes comme chez le calligraphe Zen, il y a toujours une amitié qui transparaît dans le geste, fruit d’une souplesse autant que d’une rigueur dans l’exécution. La beauté est fille de la forme lorsque celle-ci épouse l’essence. C’est pour cela que nous pouvons lire dans Le Petit Prince de Saint-Exupéry, cette déclaration magnifique et simple qui en est l’écho : « Oui, dis-je au petit prince, qu’il s’agisse de la maison, des étoiles ou du désert, ce qui fait leur beauté est invisible » (49) Un peu auparavant le renard avait confié au Petit Prince : « Voici mon secret. Il est très simple : on ne voit bien qu’avec le coeur. L’essentiel est invisible pour les yeux ». (50) Ce caractère diaphane, incolore d’une certain point de vue de la beauté correspond à sa racine ontologique, primordiale. Il est comme un nimbe où éclot la « droiture », où s’esquisse une loyauté. Schuon ne dit pas autre chose : « La beauté ne produit pas la vertu, certes, mais elle favorise d’une certaine manière une vertu préexistante ». (51) Le choix de ce célèbre récit n’est pas fortuit. Dans des entretiens accordés à Jean Biès, Schuon relève avec une acuité marquante : « Il faut acquérir l’esprit d’un métaphysicien et garder l’âme d’un enfant, rester en contact avec la nature, aimer les fleurs, lire de vieux livres simples (…) pour le reste, choisir le moindre mal » (52) Les critères retenus pour assurer la présence de la beauté et par la même celle du sacré, relèveront évidemment directement de l’intention des Mystères de telle ou telle Révélation et des outils dont la Tradition dispose pour en maintenir la pérennité. Les conséquences des questions qui s’y trouvent soulevées occupent dans l’oeuvre de Schuon une place prépondérante. Il convient également de souligner que celui-ci a peint durant toute une période et composé de nombreux poèmes d’une étincelante limpidité.

La Tradition est Amour dans la bonté cristalline du créé où se mire la beauté indicible de Dieu.

 (44) L’Esotérisme comme Principe et comme Voie, chap., « Le rôle des apparences », op. cit., p. 198.

 (45) In, Cyclologie Biblique et Métaphysique de l’Histoire, Pardès, Puiseaux, 1982, p. 72. A l’orgueil duquel [le Darwinisme] nous lui substituons cette Parole inaliénable de la Genèse en I-2-4 : « Alors YHVH Dieu modela l’homme avec la glaise du sol, il insuffla dans ses narines une haleine de vie et l’homme devint un être vivant ». Voir aussi : Jean Phaure, Le Cycle de l’Humanité Adamique : Introduction à l’étude de la cyclologie Traditionnelle et de la fin des temps, Dervy, Paris, 1983.

 (46) In, Principes et méthodes de l’Art sacré, Dervy, Paris, 1995, pp 6 – 7. Rappelons que Titus Burckhardt entretenait d’étroites relations, depuis l’enfance, avec Frithjof Schuon. Ajoutons que récemment, Tayeb Chouiref a publié deux magnifiques volumes illustrés en hommage à cette haute figure spirituelle : Titus Burckhardt : Le Soufisme entre Orient et Occident, Documents réunis et présentés par Tayeb Chouiref, tome 1, « Biographie, souvenirs et témoignages », tome 2, « Etudes et analyses », Tasnim, Paris, 2020.

 (47) Frithjof Schuon, Les Stations de la Sagesse, Maisonneuve & Larose, Paris, 1992, pp 184 – 185.

 (48) In, Approches du phénomène religieux, Le Courrier du livre, Paris, 1984, p. 174.

 (49) Coll., « Folio » No 3200, Gallimard, Paris, 1999, p. 82.

 (50) Op. cit., p. 76.

 (51) In, Les Stations de la Sagesse, op. cit., p. 169.

 (52). Entretien accordé à Jean Biès, le 26 juillet 1967, in, Epignôsis No 16, « Initiation – Vaincre la mort » [revue dirigée par Yves-Albert Dauge], Paris, octobre 1986, p. 132.

5. De la Prière :

« Si l’on rencontre souvent, écrit Luc Benoist (53)  l’existence d’une dévotion sans connaissance [Schuon] affirme qu’il ne peut y avoir de connaissance sans dévotion et sans foi. Car si l’homme peut croire sans comprendre, il ne peut comprendre sans croire (54) sans foi et sans vie. Car croire consiste à s’identifier avec la vérité telle que la compréhension nous la révèle et nous l’impose ». Cette « identification » délimite ce lieu où l’homme – « berger de l’être » d’après la pertinente formule de Martin Heidegger – qui prie devient berger de sa propre prière par le chemin d’Eternité qu’elle ouvre en lui. Mais la route est longue et ardue ! La méditation, par le « vide » qu’elle libère introduit au silence mental. Ainsi donc, en premier lieu, rappelle Swâmi Râmdas, la maîtrise du mental et l’extirpation de toutes ses « Vâsanâs » [soit des « souvenirs subconscients] sont absolument nécessaires avant que la lumière et la connaissance divines puissent illuminer le coeur » (55) Nous avons ici une distinction majeure avec la psychologie moderne qui, de manière erronée, le plus souvent, n’établit pas de différence nette entre la « conscience » et le « mental », ou entre ce qui est proprement vu et ce qui est regardé ; alors qui entre en méditation véritable pourra assez aisément se convaincre de son efficience (56) Le contraste tient entre la vision directe qui est « unitaire » au sein de la conscience, même si elle est discontinue en ses prémices, alors que le mental dualiste, toujours divisé décompose constamment ce qui est perçu. Pourtant la méditation et la prière aspirent toutes deux à rassembler, à concentrer d’une part, et à libérer, délivrer d’autre part, avec la finalité de dissiper les atermoiements de l’ego et de prodiguer les ressources infinies du « coeur-Intellect ». Des connexions qui s’établissent en fonction de la grâce, jaillira l’invocation des « entrailles humaines ». Autrement exprimé, « le serviteur [celui qui « pratique » l’oraison] ne peut se changer en Seigneur ; mais il y a quelque chose dans le serviteur qui peut – non sans la grâce du Seigneur – dépasser l’axe « serviteur-Seigneur » ou « sujet-objet » et réaliser le « Soi ». Ce Soi, c’est Dieu en tant qu’indépendant de l’axe « serviteur-Seigneur » et de toute autre polarité ». (57) Il convient d’assurer notre salut, et l’oraison est comme le tour du potier, l’argile, le corps que nous offrons à Dieu, et le céramiste, le calice qui reçoit l’eau du Saint Esprit et permet au poisson de recouvrer son milieu naturel. (58) Ce milieu est celui de la centralité. Centre en toute chose. Diligence du regard sur le visible pour embrasser l’intangible. Du plus anodin grain de poussière à la plus lointaine étoile de l’univers, l’être s’accomplit. Le point et le cercle se dilatent et se résorbent l’un l’autre comme l’origine et la fin se donnent la main. La conscience s’éveille. Le Christ Pantocrator de ses bras étendus atteint l’Infini. L’Eternité s’épanche alors dans la contemplation du Sage. L’enfance en lui, distille cette larme qui rejoint paisiblement l’océan de toute Béatitude.

La Tradition est Amour, lorsque dans son ordre de charité, elle tend comme un enfant sers paumes par delà l’illusion du monde. Or de même que l’acceptation de la Vérité soude l’homme à son être dans la certitude, que l’observance des Vertus délimite l’espace quotidien dans lequel la Vérité peut s’inscrire, que la Beauté témoigne en mode d’ampleur de la finalité de ces deux qualités, la Prière ou l’oraison appose sur l’être la lumière du « Sur-Etre », et les abritent toutes dans la nativité Royale du Seigneur. En cela la Tradition est transparence métaphysique du monde.

Pour conclure, tout provisoirement ?

Il y a chez Frithjof Schuon une quête de la nature comme « telle » enfouie au sein de l’amnésie collective et dissimulée sous les blocs erratiques du « machinisme » destructeur.

La chair du monde transfigurée, ensoleillée de l’intérieur devenue icône devant la théophanie (59) Descente voilée de la « Femme-Bisonne-Blanche », immaculée, apportant la Pipe sacrée pour le rite du du Calumet. Par la cantillation sans cesse réitérée du Saint Nom, tel le martèlement du pas de l’Amérindien sur la terre de ses ancêtres, l’homme fait éclater l’écorce figée du réel et s’éveille à la Présence, comme l’aurore se lève dans le sanctuaire majestueux des montagnes.

En montrant la richesse souvent insoupçonnée de l’accord entre les multiples modalités du vouloir humain et la connaissance métaphysique, Frithjof Schuon a scruté les mystères de la Réalisation spirituelle, des résistances que l’ego oppose à son intégration dans le « Plan divin ». Il a rendu à cet égard un service inappréciable : restituer à l’homme égaré en cette fin de millénaire sa confiance en lui et dans le monde. La foi en Dieu par la puissance de la certitude. La transparence métaphysique du monde c’est encore cela, la nature rendue à elle-même. L’attitude de Schuon est, dans cette perspective, semblable à celle de Saint Antoine qui répondit un jour à un philosophe : « Père, comment pouvez-vous être si heureux, alors que vous êtes privé de la consolation que donnent les livres ? Antoine répondit : mon livre, ô philosophe, c’est la nature et, quand je veux lire les paroles de Dieu, il est toujours devant moi ». (60) Antoine fût le guide de Saint Athanase [fêté le 18 janvier], colonne  du christianisme Orthodoxe et célèbre pour sa Théosis… La transparence métaphysique se tient en équilibre entre le Métaphysique et le « physique » qui en provient. Usons d’une image de l’esprit « Kshatriya » ou du chevalier japonais pour illustrer ce que nous entendons : la fabrication traditionnelle d’un sabre japonais ou katana répond à une science rigoureuse comme tous les Arts sacrés. Il faut insister sur le fait que l’acier de ces lames est d’une robustesse à toute épreuve, par le soin méticuleux apporté à la lente élaboration de leur conception. Mais il y a un paradoxe éminent : on ne doit jamais toucher une lame avec la main. Pourquoi ? Si le fil de la lame, d’une dureté exemplaire, tranche comme un rasoir, les doigts graciles d’un enfant peuvent l’émousser et même l’endommager très gravement (61) Dans cette « antinomie » apparente, les deux propriétés « physiques », fragilité extrême et résistance comparable ne peuvent-elles point se rejoindre ? Se marier en un « monde où se corporalisent les Esprits et où se spiritualisent les corps » d’après la célèbre formule d’Henry Corbin (62) « L’Etre est une évidence éblouissante, comparable à la fois au point géométrique et à l’espace illimité ; point implacable dans sa rigueur, et espace serein dans sa vacuité, comme l’exprime magnifiquement Schuon. (63) Iaï-Do, telle est la Voie du sabre ou de l’éveil par le tranchant : « (…) par un changement de l’attitude mentale appelée « Seishi O Choetsu », elle donnait au sabre un double but : trancher toute opposition extérieure et, intérieurement, trancher l’ego du « Bushi » [le pratiquant] pour qu’il atteigne « l’Unité » de l’être : « Iaï-Do ». (64)  » « I » signifie être établi, demeuré, résider. (…) Le second caractère, « aï », veut dire union, entente, harmonie », « Do », c’est la Voie. Ainsi, résider dans la Voie de l’harmonie par l’exercice du tranchant. Toujours la même disposition : discerner entre le Réel et l’illusion, entre l’essentiel et l’accessoire. Pour cela, apprendre à « trancher », discriminer, par la Vision intérieure juste, tel l’aigle survolant les cimes.  Frithjof Schuon écrit au sujet du Shintô, que ses « grandes vertus se trouvent essentiellement représentées par les « Trois Trésors », – qui à l’origine étaient au nombre de dix – à savoir : le Miroir, l’Epée et le Joyau ; ils signifient respectivement la Vérité, le courage, la compassion, ou la sagesse, la force et la charité ». Schuon ajoute que « le samouraï était froid comme son arme, mais qu’il n’oubliait pas le feu qui l’avait forgée » (65) Comme nous l’avons vu, ces antinomies sont le propre de la Manifestation. La Métaphysique permet d’en approcher l’affinité, l’alliance par delà toute opposition. A travers une herméneutique du symbole, elle déchiffre la chambre nuptiale de la Tradition, la Religio perennis.

C’est ainsi que Jean Tourniac, dans une très belle préface indique : « L’épée de la Tradition est celle du Roi-prêtre qui bénit Abraham et fonda, symboliquement du moins, la Cité sainte de Jérusalem. C’est le couteau dressé de terre au ciel et qui maintient en équilibre le fléau de la balance céleste, égalisant la rigueur et la miséricorde ». (66) L’oeuvre de Frithjof Schuon, c’est la rigueur affilée dans l’équanimité de la miséricorde. Encore une fois nous ne prétendons aucunement avoir donné une vue « large » ou fusse même « synthétique » de cette oeuvre incandescente, brûlée par le souffle de Dieu. Car s’il est un homme au XXe siècle qui a rendu à la spiritualité son sens le plus puissant et le plus élevé, c’est-à-dire le plus originel, c’est bien Frithjof Schuon. Notre ambition est nettement plus modeste : seulement essayer d’en indiquer quelques chemins, d’en élaguer quelques paisibles clairières, et si faire se peut, également partager l’immense enthousiasme qui est toujours le notre devant tant d’éclat et de rigueur. Si ces lignes atteignent ce but alors la noblesse de cette oeuvre nosu aura amplement récompensé de nos efforts tout en la recevant avec gratitude et vénération.

Pour m’avoir insufflé l’amour de la Tradition, je dédie à Frithjof Schuon le Psaume 40 qui est Parole de l’Eternel : « J’espérais YHVH d’un grand espoir, il s’est penché vers moi, il écouta mon cri. Il me tira du gouffre tumultueux, de la vase du bourbier ; il dressa mes pieds sur le roc, affermissant mes pas. En ma bouche il mit un chant nouveau, louange à notre Dieu.

Heureux est l’homme, celui qui met en YHVH sa foi ».

Olivier DARD

 

Achevé en avril 1999, en la Fête de Saint Nicétas le Confesseur, Higoumène du Monastère de Médicius. Saint Jour de Pâques, Résurrection de Notre Seigneur. Publication originale dans : Frithjof Schuon 1907 – 1998, Connaissance et Voie d’intériorité, biographie, études et témoignages, in, Connaissance des Religions, en co-éditions avec Le Courrier du Livre, hors série, sous la direction de Bernard Chevilliat, Paris, juillet 1999, 300 pages, op. cit., pp 257 – 278. 

 (53) In, « L’oeuvre de Frithjof Schuon », in, Etudes Traditionnelles No 461, Paris, juillet-septembre 1978.

 (54), Frithjof Schuon cite cette anecdote révélatrice : « Un compagnon du jeune Saint Thomas d’Aquin dit à celui-ci, en présence d’autres jeunes moines, de regarder par la fenêtre pour voir un boeuf qui vole ; ce que fit le Saint, sans rien voir, bien entendu. Tout le monde se mit à rire, mais Saint Thomas, imperturbable, fit cette remarque : « Un boeuf qui vole est chose moins étonnante qu’un moine qui ment ». Il n’y a pas lieu de reprocher aux âmes pures une certaine crédulité, qui en réalité leur fait honneur, d’autant que leur humilité les incline à surestimer les autres, dans la mesure où l’évidence contraire ne s’impose pas d’emblée ». In, l’Esotérisme comme Principe et comme Voie, op. cit., p. 159.

 (55) In, Pensées, La Table Ronde, Paris, 1995, ppp 30-31.

 (56). Soulignons que plus la « technique » est simple, claire, plus elle a des chances d’être efficace, nonobstant son affiliation régulière, stipulée à une Voie Traditionnelle qui en assure la légitimité.

 (57) Frithjof Schuon, « Le Serviteur et l’Union », in, Logique et Transcendance, Traditionnelles, Paris [Ed., or., 1970], 1982, p. 231.

 (58) Comme l’énonce l’ascète Saint Isaac le Syrien [de Ninive] : « Ce qui arrive au poisson sorti de l’eau, c’est ce qui arrive aussi à l’Intellect quand il sort de la mémoire de Dieu et s’exalte dans la mémoire du monde », cité d’après Hiérothée Vlacos, in, Entretiens avec un ermite de la sainte Montagne sur la prière du coeur, Points-Sagesse No 78, Le Seuil, Paris, 1994, p. 61.

 (59) Composé des mots grecs theos, « dieu » et du radical du verbe phainomai « paraître » ; la théophanie désignait l’apparition, souvent impressionnante, d’une divinité aux yeux d’un mortel », in, Dictionnaire des religions, sous la direction de Paul Poupard, P.U.F., Paris, 1984, p. 1698. 

 (60) D’après Thomas Merton, La Sagesse du désert : Aphorismes des Pères du désert, Spiritualités vivantes No 65, Albin Michel, Paris, 1987, p. 93.

 (61). Notre information sous cet aspect, provient de l’excellent ouvrage Introduction à l’étude du sabre traditionnel japonais ou Nippon To, de Daniel Gony. Ce « détail » qui n’en est point un figure p. 11, Ed., du Centre de Recherche et d’Enseignement des Ressources Humaines (C.R.E.R.H.), Besançon, 1988.

 (62) ? Voir, Daryus Shayegan, Henry Corbin, la topographie spirituelle de l’Islam Iranien, La Différence, Paris, 1990, p. 264.

 (63) In, Logique et Transcendance, op. cit., p. 29.

 (64) Voir : Malcolm Tiki Shewan, Iaïdo : L’Art du sabre japonais / The Art of Japanese Swordsmanship, Ed., de la Fédération Européenne d’Iaïdo, Cannes, 1983, p. 19. et aussi : Claude Durix, Le sabre et la vie, chronique d’un combat pour l’unité de l’être, Guy Trédaniel, Paris, 1985. 

 (65). In, Images de l’Esprit : Shinto, Bouddhisme, Yoga, Le Courrier du Livre, Paris, 1982, pp 51 – 52. Ré-édité dans la très belle collection « Théoriâ » des éditions de l’Harmattan.

 (66) Voir, préface au livre de Gérard de Sorval, Initiation chevaleresque et initiation royale dans la spiritualité chrétienne, Dervy, Paris, 1985, p. 15.

 

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